"Celui qui passe devant"
Ceux qui, un jour, ont choisi de passer en tête de cordée ont probablement été traversé par un mélange de crainte, de fierté et de plaisir.
Pour ma part, lorsque adolescent, j'ai remplacé mon leader de deux ans mon aîné au beau milieu d'une paroi, je découvrais le sel de mon existence.
Arrivé au sommet exténué mais fou de joie, pour la première fois, je m'étais senti pleinement responsable de mes actes et de mes choix....
Passer devant c'est pouvoir décider, se fixer un cap, décrypter les difficultés et choisir le bon passage, se confronter au risque réel avec parfois la crainte de chuter.
Mais passer devant n'induit pas que des qualités ego-centrées.
Passer devant nécessite un regard à la fois aiguisé et bienveillant sur ceux qui suivent : Assurer la sécurité, accompagner dans la difficulté, décider partager la joie de se comprendre et se synchroniser...
Autant des sources de ré-compenses... (étym. de mettre en balance)
Au delà de l'expérience personnelle du leader, passer devant exige une capacité à être relié à l'autre, à son équipe.
C'est le cas en alpinisme où lors de passages en corde tendue, la confiance mutuelle prend littéralement, viscéralement tout son sens. "Je te confie ma vie car tu me confies la tienne".
Lorsque les conditions empirent, que le mauvais temps arrive ou que la difficulté et l'engagement augmentent, ce contrat ne change pas. Seuls les protections, les gardes fous, augmentent... au cas où.
Christophe Kern